1895 – Le 27 avril rupture de la digue de Bouzey

HISTORIQUE DE L’ETANG ET DE LA DIGUE DE BOUZEY

À la suite de la guerre de 1870 et de l’annexion par l’Allemagne de l’Alsace et d’une partie de la Lorraine, la France ne possède plus de voie de navigation intérieure reliant le bassin de l’Océan Atlantique à celui de la Méditerranée.

Dès 1871, une décision ministérielle prescrit l’étude d’une nouvelle voie qui partant du canal de la Marne au Rhin viendrait, après avoir franchi le faîte séparatif des deux bassins aboutir à la partie supérieure du cours de la Saône. 

Plusieurs projets furent élaborés dont l’un prévoyait de relever, de plusieurs mètres, le niveau des lacs de Gérardmer, Longemer et Retournemer au moyen de digues périphériques continues pour, via la Vologne, puis la Moselle, alimenter le bief de partage des eaux (versant Saône et versant Moselle) par une canalisation dont la prise d’eau serait établie en aval d’Eloyes. 

Puis l’idée naquit de barrer la vallée de l’Avière pour constituer un réservoir qui serait approvisionné par une rigole d’alimentation de plus de 44 kilomètres de longueur, dont l’origine serait fixée à Remiremont. Le projet définitif fut présenté le 28 novembre 1876. Ce réservoir couvrait une superficie de 128 ha et sa capacité était de 7 073 000 m. La hauteur de la digue plafonnant à la cote 371.50. Cette digue, de forme rectiligne, mesurait 520 mètres de longueur, sa largeur à la base (à la cote 351.80) était de 14 mètres et de seulement 4 mètres au sommet. L’ensemble des dépenses était évalué à 3 300 000 F.

Les travaux débutèrent en 1878 pour se terminer fin 1880. Le premier remplissage eut lieu en novembre 1881, mais comme il n’était alors réalisé qu’à l’aide de l’Avière, la montée des eaux ne s’effectua qu’avec une grande lenteur.

Malgré cela, dès le début, des fuites importantes se produisirent au niveau de la digue. Elles allèrent en s’accentuant, et pourtant le 4 décembre 1883, on n’avait encore approvisionné que 1 400 000 m3. Mais ce même jour, les eaux de la Moselle pénétrèrent pour la première fois dans le réservoir de BOUZEY. 

Le remplissage s’accélérant, les14 et 15 mars 1884 on atteignit la cote 368.80, c’est alors que la partie centrale de la digue s’infléchit en arc de cercle, vers l’aval, sur 135 mètres, avec une pointe d’éloignement à34 centimètres. Et l’on constata qu’à la base de la digue, côté amont, une grande fracture horizontale s’était produite, qui éloignait l’édifice du mur de garde. D’autres fractures, de moindre importance, furent également relevées. Les fuites s’accrurent considérablement. Par précaution, on installa sur la digue une lunette méridienne pour mesurer les flèches que prendrait la digue sous la pression de l’eau. 

Le réservoir resta en l’état une année durant. En 1885, on procéda à sa vidange et des sondages furent effectués de part et d’autre de la digue. Des travaux de consolidation consistant en la mise en place d’un solin à l’amont et des renforcements des fondations à l’aval furent réalisés, malgré les avis divergents de certains experts. Et le second remplissage débuta le 18 novembre 1889, jour où l’on atteint la cote maximale de 371.5 mètres.

Jusqu’au 27 avril 1895, date de la catastrophe, le niveau de l’eau sera maintenu à cette cote, bien que d’inquiétantes gerbes d’eau jaillissent des entrailles de la retenue, suscitant de très grandes craintes dans toute la vallée de l’Avière.